2962- Souléry Peur ou Vertige /.Revue presse et médias 8 posts
EDITORIAL. Législatives 2024 : La peur ou le vertige
Plus que quatre jours pour convaincre. C’est désespérément court. Que faire alors que cette campagne express ne permet pas la réflexion et que le choix politique est historiquement grave ? Que faire pour que les Français choisissent en toute connaissance de cause, sans subir le poids des émotions mais avec un minimum de sagesse ?
Comme une météo maussade, ces questions trahissent une réelle inquiétude qui gagne les esprits : l’envie de rupture avec la gauche, oui, bien sûr – mais en même temps la crainte d’une aventure dont on ne connaîtrait pas la fin ; l’envie d’extrême autorité avec l’extrème-droite, peut-être – mais en même temps la peur de divisions irrémédiables et des cassures brutales de notre société ; l’envie de continuer avec une majorité présidentielle, sans doute pas – mais avec cette petite musique nous murmurant que c’est après tout le plus rassurant… Où donc trouver la porte de sortie au fond de l’isoloir ?
Les Français soudain se passionnent pour la politique comme à chaque fois que les enjeux d’une élection risquent de précipiter le pays sur une voie nouvelle. Mais rarement le clivage n’avait été aussi profond, les choix aussi déterminants, les oppositions aussi frontales, au point qu’on se demande avec raison si, le 9 juillet, au lendemain du second tour, la France sera encore gouvernable, au point qu’on redoute surtout qu’elle verse dans une vraie crise institutionnelle, un chaos politique dont elle ne sortira que meurtrie ou en tout cas affaiblie.
Pour connaître les programmes que les trois blocs nous proposent, un débat suffira-t-il ? Nous permettra-t-il, à travers le jeu déformant de la télévision, de mesurer les véritables enjeux et les conséquences d’un choix ? Celui qui opposera ce soir les trois projets politiques ne sera pas porté par les trois leaders repoussoirs de chaque camp – Emmanuel Macron, Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon –, c’eut été prendre des risques rédhibitoires.
Gauche, centre et extrème-droite ont choisi de rajeunir leur image avec leurs nouvelles têtes d’affiche Gabriel Attal et Jordan Bardella, la jeune garde qui mène le combat – mais on doit surtout craindre que le troisième débatteur, Manuel Bompard, ne représente pas totalement la gauche unie.
Malgré les arguments, les attaques ou les esquives, on peut croire que nul ne parvienne à vraiment bouleverser des opinions déjà figées. Nous vivons enfermé dans une sorte de manichéisme, un avenir noir ou blanc – brun ou rouge –, et ne sachant s’il faut larguer nos habitudes passées, pour demain s’abandonner à la peur ou au vertige.