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Pas d’avenir sans reprise du dialogue à Nouméa
Secouée comme jamais depuis la guerre civile des années 1980
qui avait produit le drame d’Ouvéa lors de la présidentielle de
1988, la Nouvelle-Calédonie vit des heures sombres. Face au
déchaînement de violences commises par de jeunes émeutiers
incontrôlables, le couvre-feu a été instauré à Nouméa en attendant
l’arrivée de renforts de forces de l’ordre depuis la métropole.
Pour obtenir le retour au calme – l’urgence absolue –, beaucoup dépend
de l’attitude des chefs indépendantistes. Visiblement débordés,
ils doivent sortir du silence, dénoncer les exactions et revenir à l’esprit
des accords de Nouméa de 1998 qui ont assuré au « Caillou » une
période relativement pacifique ayant permis de poser les jalons d’un
avenir partagé. Pour l’heure, on n’en prend pas le chemin, sachant que
les responsabilités de ce nouvel embrasement sont partagées.
Les indépendantistes se disent persuadés que le « dégel » du
corps électoral calédonien, que le Parlement français s’apprête
à voter, est une machine à « minoriser» les autochtones et à
éloigner un peu plus la pleine indépendance qu’ils réclament.
C’est oublier un peu vite que l’exclusion, désormais, d’un électeur
sur cinq du droit de voter au scrutin provincial est devenue avec le
temps une anomalie démocratique.
Ce gel, qui permet aux Kanaks de diriger le gouvernement local sans
être majoritaires, n’a pas empêché l’électorat de dire trois fois « non » à
l’indépendance. Et rien ne dit que 25 000 électeurs de plus favoriseraient
a priori le camp « loyal » à une France qui, soit dit en passant, a
déjà accordé à la Nouvelle-Calédonie une large souveraineté politique,
économique, sociale et fiscale, ce qui rend aberrants les reproches de
« colonialisme » brandis par les indépendantistes radicaux.
Mais le gouvernement a eu tort, après un troisième référendum tenu
sans attendre la présidentielle de 2022, de laisser ce dossier sensible
entre les mains du ministre de l’Intérieur alors que, de Michel Rocard
à Édouard Philippe, il a toujours été piloté depuis Matignon. Gabriel
Attal va-t-il renouer avec cette bonne habitude ? Ce serait un signal
positif.
Le dégel du corps électoral ? Il est nécessaire mais le dialogue local
doit reprendre sur ses modalités. Le président de la République
semble l’avoir compris en annonçant qu’il prendrait son temps pour
faire inscrire le texte dans la Constitution, quitte à retarder le scrutin
provincial. La fin des violences sur le « Caillou » est à ce prix.
Éditorial Sud-Ouest par Christophe Lucet