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L’ombre de Navalny sur la pseudo élection russe

 

 

Quel intérêt de commenter un résultat électoral ou même un
« taux de participation » dans un pays aussi verrouillé que la
Russie de Poutine ? Presque aucun puisque les chiffres qui
ont été annoncés hier soir à Moscou avaient été préparés

en amont par la présélection de candidats inoffensifs,
des obstacles administratifs et l’intimidation des électeurs.
Il est plus pertinent de se demander pourquoi Vladimir Poutine tient
toujours à baptiser « élection » un plébiscite. Sans doute parce qu’un
scrutin avec des bureaux de vote et des isoloirs, précédé d’une campagne
et sanctionné par des « résultats », permet de mettre en scène
un chef qui écoute et remet son pouvoir en jeu.


Et puisque la mascarade ne saurait plus abuser personne à l’étranger et
moins encore en Russie, on dira surtout que conduire un peuple aux
urnes entre deux rangées de policiers, y compris dans les territoires
occupés d’Ukraine, est le moyen glacial de lui rappeler qu’ici,
comme du temps de l’URSS, le pouvoir ne se partage pas.
Le fait saillant du scrutin russe est ailleurs. Le souvenir d’Alexeï
Navalny qui flottait sur les cortèges d’électeurs à midi pile,
l’heure prévue par ses amis et ses soutiens, devant certains
bureaux de vote en Russie et devant de nombreuses ambassades
russes – à Paris, Berlin, Tallinn, La Haye, Istanbul ou Belgrade – a
suffi à éclairer ce théâtre d’ombres en rappelant qu’un autre chemin
existe pour les Russes. Il suffisait de voir sa veuve Ioulia Navalnaïa faire
la queue à Berlin aux côtés de tous les courageux et courageuses osant
encore militer à visage découvert en votant contre Poutine.


Tous ces citoyens bafoués sont allés aux urnes en sachant l’inutilité
actuelle de leur vote. Mais, par leur présence, ils ont voulu dire qu’un
régime sans scrupule ne défigurerait pas éternellement le beau rituel
de la démocratie. Car, dans la Russie de 2024, voter, même à l’occasion
d’un simulacre, est la seule façon qui reste de faire vivre cette « autre
Russie » dont les porte-parole ont été muselés, emprisonnés ou tués.
On n’affirmera pas que le plébiscite qui vient d’avoir lieu est un non événement,
puisqu’il va prolonger chez Poutine le sentiment d’être à la
fois la seule voix et le bras vengeur de la Russie. Mais ce blanc-seing
obtenu par la contrainte risque surtout de rendre le régime du Kremlin
encore plus sourd aux désirs et aveugle aux intérêts d’un peuple entraîné
dans l’absurde et criminelle guerre d’Ukraine.

 

Éditorial Sud-Ouest
Christophe Lucet




18/03/2024
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