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DÉCRYPTAGE

Le coup de Trafalgar de François Bayrou fragilise le camp d'Emmanuel Macron

Les déclarations de leader centriste sèment la zizanie dans la majorité présidentielle et dans son propre parti. Tout en minimisant, l'exécutif redoute les effets dans l'opinion de sa critique sur la déconnexion du pouvoir.*

 

François Bayrou a renoncé à rejoindre le gouvernement de Gabriel Attal.

François Bayrou a renoncé à rejoindre le gouvernement de Gabriel Attal. (JEAN-FRANCOIS MONIER/AFP)

Par Isabelle Ficek

Publié le 8 févr. 2024 à 16:50Mis à jour le 8 févr. 2024 à 17:29

« C'est un beau bordel et c'est finalement tout ce que les Français vont retenir », lâche, mi-effaré mi-blasé, une source gouvernementale ce jeudi après les sorties tonitruantes de François Bayrou. Il faut dire que le président du Modem a jeté un pavé dans la mare en claquant mercredi soir la porte du gouvernement avant même de l'avoir passée , tout en affirmant un désaccord sur la politique à suivre.

Le maire de Pau a enfoncé le clou ce jeudi sur Franceinfo, critiquant dans la première vague du gouvernement de Gabriel Attal une équipe très parisienne, à ses yeux déconnectée des vrais problèmes du pays. Ceci sans avancer aucune proposition.

Profonds différends sur l'éducation

« Je ne laisserai pas dériver les choses sans rien dire », a-t-il fait valoir, et pour lui ces « dérives » mènent tout droit au Rassemblement national. « Le RN est à 30 % et pourtant, il n'y a pas 30 % de Français fascistes, les gens ne se reconnaissent pas dans la politique menée », appuie un proche du Béarnais.

 

Ce dernier, qui guignait le portefeuille de l'Education ou un grand ministère de l'Aménagement du territoire, refusait de poursuivre sur la voie tracée par Gabriel Attal à l'Education nationale, laissant entendre sur Franceinfo qu'il s'agissait là de « technocratie gestionnaire » avec pour « musique de fond que les enseignants ne travaillent pas assez ».

Une critique qui vise aussi le secrétaire général de l'Elysée, Alexis Kohler, avec lequel François Bayrou a eu de profonds différends durant la campagne présidentielle sur l'éducation

 

 

Présidentielle 2027

Tout en assurant que le Modem était pleinement dans la majorité, celui qui a déjà été trois fois candidat à la présidentielle s'est positionné pour celle de 2027 en assurant vouloir réconcilier « la France qui se bat en bas et la France qui décide en haut ». Des propos qui ont déstabilisé le camp présidentiel et ravivé les divisions d'un « bloc central » qui peine de plus en plus à cacher que le dépassement des clivages prôné en 2017 est moribond.

 

C'est d'abord au sein du Modem que les explications de texte ont été salées dès mercredi soir entre François Bayrou et les députés, sur le thème de « On t'aime beaucoup mais tu fais n'importe quoi », relate un participant.

Compagnon de route, Jean-Louis Bourlanges a décoché ses flèches et s'est fendu ce jeudi d'un communiqué ciselé. Il y dénonce « l'incohérence » et tire à boulets rouges sur la voie que traçait François Bayrou d'une « participation sans le soutien […] politiquement inepte et moralement dégradant ». En séminaire ce jeudi, les députés Modem ont finalement assuré leur « soutien et participation » à la majorité…

Rupture irrémédiable ?

Cela a été accueilli avec un grand soulagement du côté de l'exécutif, qui ne dispose déjà que d'une majorité relative à l'Assemblée. Car s'il minimise l'épisode, l'exécutif sait aussi qu'il le fragilise. « Depuis longtemps, Emmanuel Macron sait bien que, qu'il soit dehors ou dedans, plus 2027 approche et plus François Bayrou va chercher à installer une couleur différente du gouvernement », admet un proche du chef de l'Etat. « Les Français ne l'attendent pas, égratigne un conseiller, mais le problème est qu'il appuie là où ça fait mal, le parisianisme, le manque d'empathie, la déconnexion. »

Au-delà du Modem et de l'exécutif, dans la majorité, les réactions sont mitigées. D'aucuns sont ulcérés par les « critiques sans proposition d'un boutiquier ». D'autres estiment que le président du Modem a dit tout haut ce que certains pensent tout bas.

« François Bayrou exprime à voix haute l'inquiétude d'un nombre croissant de représentants de notre majorité suscitée par le risque de dérive droitière et populiste de l'exécutif avec le remaniement, la conférence de presse d'Emmanuel Macron et la déclaration de politique générale de Gabriel Attal. Stratégie visant à barrer la route du RN et qui risque au contraire de la conforter » , avance l'ex-président du groupe Renaissance au Palais-Bourbon Gilles Le Gendre.

Un proche de François Bayrou s'interrogeait pour savoir à quel point cet épisode pouvait conduire à une « rupture irrémédiable ». Mais, nouveau rebondissement qui risque de remettre en sourdine les velléités d'échappée du maire du Pau, le parquet a fait appel ce jeudi après-midi de sa relaxe dans l'affaire des attachés parlementaires du Modem .

 

Isabelle Ficek  LES ECHOS



08/02/2024
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