Macron, les factieux et les «rois de la teuf»
Face aux violences, mais aussi, chez certains jeunes, à l’idée que les manifestations seraient « tendance », l’exécutif doit trouver la riposte.
Il y a un fossé entre les «méga-bassines» et le recul de l'âge de départ à la retraite. Et pourtant, dans les deux cas, l'exécutif est confronté à une vive recrudescence de la violence. À commencer par cette différence : les manifestations contre les premières étaient interdites, les secondes autorisées. Et cette autre distinction : à Sainte-Soline, les scènes de guerre ont dépassé, en intensité, tout ce qui a débordé des cortèges contre la réforme des retraites. Mais, dans les deux cas, la faute est rejetée par les organisations de gauche sur le pouvoir, accusé d'abuser du monopole de la «violence légitime». Pourtant, il suffit de visionner quelques vidéos, tournées de l'intérieur d'un véhicule de police, pour constater à quel point, samedi dernier, les forces de l'ordre étaient avant tout des cibles à abattre.
L'accusation se porte toutefois sur l'entrave supposée à la prise en charge et à l'évacuation des manifestants blessés. De même, une petite musique émerge pour présenter policiers et gendarmes chargés d'encadrer les manifestations dans les grandes villes comme des fauteurs de troubles, face à une jeunesse avide de faire la fête sur la chaussée. En témoigne le succès de cette vidéo, vue plusieurs millions de fois, où une danseuse démontre ses talents au nom de la lutte. Ou encore cette scène où des dizaines de jeunes se déhanchent au son de quelques tubes du moment. Ou encore cette autre où des manifestants emmenés en garde à vue dans un car de police chantent à tue-tête, comme si ce petit voyage était le meilleur moment de leur journée. L'entrée de la jeunesse dans le mouvement n'est pas une bonne nouvelle pour le président. Au fil des jours, cela semble «trop cool» de s'en prendre à sa personne, par flics interposés, en dansant ou en jetant des pavés cloutés.
La hargne et la jubilation
L'équation est d'autant moins simple, pour Emmanuel Macron, qu'il est la cible principale, sinon exclusive, de ce cocktail explosif de hargne et de jubilation. À un bout du spectre, les hordes qui ont déferlé ce week-end dans les Deux-Sèvres pour organiser le triste spectacle d'intolérables scènes de guerre. À l'autre, la perspective de manifestations contre la réforme des retraites à la fois violentes et festives, où une partie de la jeunesse se rend comme on irait en rave party. Dans les deux cas, la même expression d'une détestation de sa personne, sur laquelle espèrent bien surfer les démagogues.
Si la plupart des responsables syndicaux se montrent de ce point de vue irréprochables, chacune de certaines personnalités de gauche a sa manière de souffler sur les braises. Et pas seulement Jean-Luc Mélenchon. François Hollande feint ainsi de se demander qui est le vrai fauteur de troubles pour mieux répondre que son successeur est à l'origine du mal. Des élus Verts ont dénoncé une «dérive violente de l'État», sans un mot pour condamner les exactions de l'ultragauche.
Il leur sera difficile, ensuite, de mettre la main sur leur petit cœur de gauche pour assurer qu'ils combattent de toutes leurs forces l'extrême droite depuis le berceau : les sondages indiquent qu'une dissolution de l'Assemblée nationale profiterait en premier lieu à Marine Le Pen, dont le RN se présente plus que jamais comme l'ultime rempart au désordre. C'est là un message tout trouvé pour l'exécutif… à condition qu'il soit entendu.