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Libération 29 août 2019 La lettre politique de Laurent Joffrin  Salvini : veni, vidi... pschitt

Il voulait passer le Rubicon : il est tombé dedans. Matteo Salvini, ce sous-César numérique et barbu, qui a gagné non la guerre des Gaules mais celle de Twitter, pensait provoquer des élections en détruisant la coalition qu’il avait lui-même montée un an et demi plus tôt. Las ! Dans un réflexe de survie, la démocratie italienne a sorti de son chapeau une de ces combinazione dont elle a le secret. Plutôt que de retourner aux urnes prématurément, les partis inquiets du succès de la Ligue se sont brusquement rabibochés pour maintenir le président du Conseil, Giuseppe Conte, en place et pour constituer une nouvelle majorité parlementaire. Du coup, celui qui croyait s’emparer de tous les pouvoirs n’en a plus aucun, sinon le ministère de la parole qui désormais tourne à vide. Veni, vidi… pschitt.

Certes, l’alliance des sociaux-démocrates et des Cinq Etoiles est celle de la carpe et du lapin, sans qu’on sache encore si c’est la carpe qui a sauté hors de l’eau ou le lapin qui a enfilé un scaphandre. La peur de perdre a scellé cette coalition, et non une quelconque convergence programmatique. On dira que cet emplâtre ne saurait tenir, que Conte ne pourra pas gouverner longtemps, que Salvini dans l’opposition aura tout loisir de déployer en grand sa démagogique éloquence, que c’est finalement reculer pour mieux sauter, à la prochaine échéance, dans une sorte de fascisme soft et légal dominé par la Ligue, avec quelques supplétifs post-mussoliniens ou berlusconiens.

C’est oublier une réalité maintes fois démontrée : en politique, il faut saisir sa chance quand elle passe. Salvini a vu passer la sienne ; il n’a pas su l’attraper. L’histoire repasse rarement les plats. Grâce à une manœuvre sans gloire, ses adversaires ont évité le pire et gagné du temps – trois ans selon la Constitution. La tâche est ardue, l’attelage hautement incertain. Mais enfin, il vit.

Dans ces circonstances, l’Europe tient en main les cartes décisives. Si enfin lui vient un début de sens politique, elle aidera de tout son possible la nouvelle majorité italienne. En desserrant la contrainte budgétaire qui gêne le gouvernement italien, en proposant des projets communs, en prenant résolument en charge la question des migrants de la Méditerranée qui alimente sans cesse la popularité de la Ligue. Bref, en faisant sentir aux classes populaires italiennes, soutien de Salvini, que Bruxelles se soucie d’elles, que l’Union n’est pas la mère fouettarde qu’on croit, qu’elle peut aussi aider, favoriser, protéger les peuples qu’elle est censée unir. Pour Bruxelles, ce n’est pas une affaire de calculs, de raisonnements macroéconomiques ou de principes monétaires. C’est une question de survie.

LAURENT JOFFRIN

  

Italie and Co: les populistes coûtent cher à leurs pays

SLATE  

Les démagogues qui promettent monts et merveilles à l'électeur qui leur accorde leur vote, se retrouvent les plus coincés une fois élus.

Le ministre de l’Intérieur italien Matteo Salvini, le 9 juillet 2019. | Andreas Solaro / AFP
                      
Le ministre de l’Intérieur italien Matteo Salvini, le 9 juillet 2019. | Andreas Solaro / AFP             
        

Cela peut paraître assez peu, pendant longtemps l'Italie empruntait à 5%, la Grèce pendant la crise à plus de 20%. Mais la période récente a vu tous les taux d'obligations des États reculer fortement et devenir négatifs. L'Allemagne emprunte à -0,5%, c'est-à-dire que ce sont les prêteurs qui paient pour avoir le droit de placer de l'argent dans les Bunds germaniques. La Tranquilität est à ce prix. Du coup le prix italien apparaît comme ce qu'il est: très élevé. 

Comme Rome est très endettée, à 2.370 milliards d'euros soit 130% du PIB, le gouvernement doit chaque année verser 65 milliards d'intérêt, autant que le budget de l'Éducation nationale. Depuis un an, et l'arrivée du gouvernement Conte issu de l'alliance de la Ligue du Nord et de 5 étoiles, le surcoût provoqué par la hausse du spread a été estimé à 5 milliards par an par le gouverneur de la Banque d'Italie.

 

 

Les démagogues tenus en laisse

Les marchés financiers sont les surveillants des gouvernements. Surveillance les yeux fermés pour les pays vertueux, d'un œil bienveillant pour les pays bons élèves, et à la jumelle méfiante pour les pays qui prétendent se «libérer» de leurs contraintes budgétaires et qui discourent sur le thème «la politique doit s'imposer à l'économie». C'est le paradoxe, les démagogues qui promettent monts et merveilles à l'électeur qui leur accorde leur vote, puis ils se retrouvent les plus coincés une fois élus. Les populistes sont tous dans ce cas-là: leur pire ennemi s'appelle le spread. La démagogie est tenue en laisse.

Matteo Salvini comme Boris Johnson ou Marine Le Pen trouvent illégitime cette inversion des forces et ils dénoncent «la mainmise des marchés», l'argent sans frontière, l'oligarchie internationale. Mais plus ils crient fort, plus la laisse est raccourcie autour de leur cou, le spread se resserre. Et le-dit gouvernement est pris au piège: ses promesses hors budget inquiètent les marchés qui augmentent les taux d'intérêt ce qui a pour effet d'éponger plus encore des crédits que le gouvernement promettait de consacrer aux ménages-électeurs. Le démagogue se retrouve encore plus à court que le social-démocrate qu'il a «dégagé», il est privé de moyens, il doit être encore «moins» social que lui.

Les marchés jouent ainsi le plus souvent le rôle de «troisième tour» politique, comme un retour du bâton renvoyé aux électeurs crédules qui se sont laissés bernés par les Salvini, Johnson ou Le Pen. Les hurlements des extrémistes de gauche et de droite contre «le déni de démocratie» que constitueraient ce pouvoir des marchés est audible sur le fond. Encore faudrait-il aller au bout du raisonnement et s'interroger dans une démocratie sur le respect de la propriété privée des prêteurs. Il faudrait logiquement dire qu'il faut les spolier. Mais le dire est voir à coup sûr le spread exploser.

 

Perte de richesse

Le populiste est ainsi pris au piège et il faut l'avouer cette «leçon de chose» donnée par les marchés est très jouissive pour les démocrates qui se désespèrent de voir les populistes gagner. Les marchés rappellent à la réalité, ils renvoient les démagogues à leur démagogie.

L'autre arme des marchés est le taux de change. L'Italie a l'euro (elle peut s'en féliciter en ce moment!), le jeu porte sur les taux d'intérêt. Mais la Grande-Bretagne voit-elle non seulement ses taux se tendre mais la valeur de la livre sterling chuter. Elle vaut 1,07 euro contre 1,17 il y a trois ans avant le vote pour le Brexit. Comme pour l'Italie avec le spread, la chute du change n'est pas (pas encore) catastrophique (10%) et on peut y voir un avantage de compétitivité. Mais c'est quand même une perte de richesse de 10% de chaque Britannique. Les démagogues coûtent cher. 

                                                         *****

 « Une chance inouïe » RENCONTRE

 

 Violences, manifestations, retombées économiques, communication ou encore indemnisations : une semaine après le G7, Michel Veunac revient sur l’impact du sommet

 

Une semaine après la fin du G7, le maire de Biarritz, Michel Veunac, tire le bilan.

« Sud Ouest » 

De votre point de vue, comment se remet Biarritz ? Michel Veunac Biarritz va très bien ! Parmi nos critères de mesure, il y a le nombre de personnes qui se présentent à l’accueil de l’of fice de tourisme chaque jour. Jus qu’au 22 août, la fréquentation a été identique à celle de l’an dernier. À partir du 23, évidemment, tout change, c’est clair. Mais dès le mar di 27, nous enregistrons 848 visites : ça baisse, mais c’est le chiffre de 2018 aussi, c’est habituel à cette période. Donc, jusqu’au 20 et par la suite, il n’y a eu aucun « effet G7 ».

 

Le maire de Bayonne, JeanRené Etchegaray, dit avoir peu goûté que vous vous félicitiez de « 4 jours sans violence  »   (notre   édition   du 28 août). Chez lui, il y a eu des violences. Que lui répondez-vous ?

Il n’y a pas eu de violences à Biar ritz, pas à Hendaye, pas à Urrugne,pas à Anglet. On le doit à la forte présence policière et au sens des responsabilités des organisateurs du contresommet qui ont su faire un  défilé pacifique à Hendaye. Nous n’avons été ni dans la situation de Gênes, ni dans celle d’Évian il y a quelques années. À Bayonne, ce n’était quand  même  pas la guerre civile ! Le samedi soir, pendant une heure, une trentaine de gars ont cherché à en découdre et ont été vite stoppés. La ville n’a pas été mise à feu et à sang. Je regrette ces manifestations mais elles ont été réduites à peu de chose par rapport à ce qu’on pouvait redouter.

Le dimanche, les organisateurs du contresommet ont annulé les 7 actions pacifiques prévues autour de Biarritz. Pour eux, l’ambiance sécuritaire ne permettait pas de les assurer. Qu’en pensez-vous ?

J’en pense qu’il faut donner tous les arguments. Je me réfère à un article du « Monde » (daté du 25 août, NDLR) qui évoque, outre le dispositif policier dissuasif, une seconde raison à l’annulation de ces manifestations supplémentaires : la faible  mobilisation  de  ceux  qui étaient censés venir.  Les gens s’étaient exprimés à Hendaye la veille et beaucoup étaient déjà repartis.

Comment évaluez-vous l’impact de ce sommet sur l’image de Biarritz ?

 

Rien que sur l’hôtel du Palais on en est déjà à 5 000 contenus médiatiques, papiers, images, journaux, reportages dans le monde entier et ça continue. À la mairie, nous sommes en train de faire une re vue de presse, mais on ne sait pas par où la prendre tellement y a d’éléments. En plus, on a eu une chance inouïe : une météo de rêve et donc des images superbes diffusées partout.

Les retombées du G7 en termes de communication sont-elles réelles et estimables ?

Dans le jargon on parle de « contre-valeurs » publicitaires. C’est toute la publicité faite sur un objet, ici Biarritz, sans qu’on ait à le payer, parce qu’il  y a un  événement comme celui-là. Cela équivaut à plusieurs  millions  d’euros.  Per sonne ne pourrait se payer une publicité comme ça. Grâce à cet événement historique, Biarritz a été mise en lumière pour plusieurs mois, plusieurs années.

Les annonces gouvernementales sur l’indemnisation des commerçants lésés semblent  encourageantes. Mais n’y a-t-il pas eu un défaut de communication en amont du G7 sur le dispositif ? À part des promesses, ils n’avaient pas l’assurance que leurs pertes seraient prises en compte.

Je leur avais dit : « Restez ouverts, donnez l’image d’une ville vivante parce qu’il y aura un processus 

d’indemnisation. » C’est vrai, au moment où on en a parlé, le processus n’était pas très clair, j’en   conviens. Mais il y avait des choses que l’on ne pouvait pas divulguer. Pour élever un peu le débat : j’ai dit « oui » au G7 pour servir Biarritz.

En servant Biarritz, j’ai le senti ment de servir l’activité économique de notre ville. Peut-être pas à

très court terme mais à moyen et long terme. On verra bien, si les Américains reviennent et si on en- registre des évolutions dans la fréquentation de la ville par des gens d’autres nations. Moi, j’en suis convaincu.

Vous avez beaucoup martelé que ce G7 devait être profitable à Biarritz. Combien lui a-t-il coûté ?

On est en train de faire les calculs et bien sûr, je les montrerai. Je ferai les comptes au centime près de ce que ça a coûté.

Recueilli par Raphaëlle Gourin

  

« JE N’AI PAS TOUT ACCEPTÉ »

 

Les exigences en termes de sécurité étaient audelà du drastique. Michel Veunac le martèle pourtant : « Je n’ai pas tout accepté ». Il a parfois obtenu gain de cause, parfois non. Par exemple, les 70 containers enterrés de la zone rouge devaient être retirés dès le lundi précédent le G7 : les habitants auraient dû transporter 8 jours durant leurs déchets en zone bleue.

« J’ai refusé, dit le maire. Ils ont été neutralisés au dernier moment et ça a été réduit à 4 jours de nuisances. »

Autre exemple, le dîner des chefs d’État du samedi soir au phare était à l’origine prévu au Port Vieux. « Il aurait alors fallu neutraliser la Côte des Basques et le Port Vieux pendant une demi-journée. Pendant des semaines, je m’y suis opposé, je me suis battu mais ça semblait hors de question. » Les photos des installations d’Hermès lors d’une soirée au phare ont fini par convaincre. Les services présidentiels ont changé d’avis, une quinzaine de jours avant.

Pas de retournement de situation en revanche sur les barrières occultantes, devant des commerces des zones protégées. « J’ai donné mon veto mais je n’ai pas été entendu et je le regrette », avoue Michel Veunac.

 

Sud-Ouest 

                                                      ***

(sondage Harris Interactive France : � https://harris-interactive.fr/…/barometre-de-confiance-pol…/)

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12/08/2019
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