1409- Des livres pour les vacances 9 posts

 Des livres à ne pas acheter cet été (Slate)

Il Faut du Temps pour rester jeune Michel Drucker)

Indice sieste: 4/5

Parfois, on regrette que les gens qui publient leurs mémoires n'aient pas Alzheimer. Michel Drucker a écrit un ouvrage non stimulant dans lequel il ne laisse rien ignorer des ingrédients de son «bouillon de légumes aux vermicelles» (parfois, il s'autorise «une tranche de jambon-coquillettes et un yaourt sans sucre avec à la rigueur une cuillère de miel») ni de ses exploits à bicyclette.

N'hésitant pas à recopier la base de données de Doctolib, il énumère sa cohorte de médecins: son cardiologue, celui qui «surveille ses yeux», l'autre qui «prend soin de [ses] poumons», un urologue, qui «prend soin» –ah non pardon, rien n'est précisé–, deux médecins généralistes et deux ostéopathes. Cette lancinante fresque hypocondriaque évoquerait presque La Montagne magique. Presque.

«À n'importe quel âge, vieillir n'est pas facile», explique-t-il. D'emblée, nos paupières sont lourdes.

Pour ne pas vieillir, il fait du vélo dès la page 9, car le livre commence page 9, et il en fait à peu près jusqu'à la fin du bouquin, ce qui rend cet ouvrage aussi palpitant qu'une étape de plat du Tour de France filmée au ralenti. Les rebondissements se poursuivent, à un rythme haletant.

Il se regarde dans la glace et se trouve «une sale gueule» (p. 20), est prêt à «partager [son] expérience. Pour partager, il n'est jamais trop tard» (p. 37), avale «des compléments alimentaires conseillés par Jeannie Longo» (p. 67), s'exclame «Vive le riz, vive les pâtes, vive les légumes, vive le poisson!» (p. 71), «fonce dans la cuisine en parler à Dany» (p. 105, Dany est toujours dans la cuisine, Michel fonce toujours), laquelle a «un air accablé», devient proustien p. 161 («le temps qui passe m'est resté en travers de la gorge»), demande à Jean-Pierre Foucault (p. 202) si «Ça va, Jean-Pierre?» en sachant que, non, forcément, ça va pas, Jean-Pierre car «pour lui non plus la sénénité n'était pas une évidence», on le devine dans ses écrits, car Jean-Pierre écrit, lui aussi. Finalement, au terme d'un insoutenable suspense, Michel nous rassure: «Je serai toujours au début du reste de ma vie» (p. 267).

 

Entre chaque contemplation métaphysique, il cite des chansons in extenso (ça meuble) et égrène les noms de célébrités amies: Raymond Devos, Johnny Hallyday, Claude François, Charles Aznavour, Thierry Le Luron... Son name dropping ressemble de plus en plus au carré platinum du Père-Lachaise, sans Jim Morrison. Forcément, c'est le seul endroit animé du cimetière.

Entre deux cadavres, il s'amuse à compter les vieux et recense ainsi plus de 20.000 centenaires:

«Cinq femmes pour un homme, ce qui trahit bien l'inégalité entre hommes et femmes qui subsiste de nos jours. Les bonhommes picolent, fument comme des pompiers, oublient leurs calories, leur cholestérol, se stressent et se crèvent au boulot quand leurs dames sont quand même beaucoup plus sereines. Toutefois, depuis ces dernières années, ce déséquilibre tend à s'estomper puisque de plus en plus de femmes mènent des existences d'hommes.»

Ah ben voilà, les demoiselles, hein, ça vous apprendra à faire les hommasses.

Indice réveil brusque: 1/5

Le principal enseignement de ce livre se trouve en page 5:

«MICHEL DRUCKER avec la collaboration de Jean-François Kervéan»

Ce dernier a déjà prêté plusieurs fois sa plume à Michel Drucker mais aussi à d'autres grandes figures du monde littéraire: Hervé Vilard, Loana, Nabilla, Catherine Breillat. Il parvient à écrire sans ciller: «J'ai dépassé l'âge parce que l'âge, c'est dépassé», citation qui pourrait détrôner celles de Paulo Coelho sur les sites de rencontres.

 

Des livres qu'on peut lire ou ne pas lire

 



16/07/2019
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