1386- L'Europe incontournable 44 posts

Petit résumé pour ceux qui n'ont pas le temps de lire entièrement la très bonne analyse de Daniel Soulez Larivière.

 

Depuis le XVIIIe siècle, nous n’avons réussi qu’à nous étriper jusqu’aux horreurs de la Deuxième guerre mondiale, avant de commencer la construction de l’Union Européenne. (....) L’UE n’est pas un simple épiphénomène survenu par hasard après la Deuxième guerre mondiale. Elle est l’aboutissement d’un processus de plusieurs siècles pour chacun de ses États qui, après s’être fait la guerre constamment, ont trouvé plus intelligent et plus productif de s’unir.(....) Consciemment ou non, les pères de l’Europe pensaient que, grâce à la Communauté Européenne du charbon et de l’acier d’abord, puis au marché commun, ce qui avait échoué en démarrant par le politique aboutirait grâce à l’économie. Comme si la politique, étant une superstructure, devait suivre l’unification par les infrastructures selon un schéma néo-marxiste. (....) La création de l’euro, monnaie commune, après le traité de Maastricht de 1992, aurait dû être suivie d’une organisation politique. L’euro est toujours vivant mais, depuis le traité de Nice, entré en vigueur le 1er février 2003, complété par le traité de Lisbonne de 2009, l’Europe est passée de 6 ou 7 à 28. La fin du rideau de fer en 1989 a obligé l’Union Européenne à accueillir des nouveaux venus, contrairement aux vœux de François Mitterrand. Celui-ci était partisan d’une salle d’attente pour eux, dans une confédération européenne autour d’une union plus resserrée à huit. Mais la réunion de Prague en juin 1991 pour préparer ce traité avec Vaclav Havel échoua sous la pression des États-Unis toujours hostiles à une Europe forte, indépendante, devenue une "ennemie" sous Trump. Cette organisation à 28 a plombé le début de l’intégration européenne et tué dans l’œuf cette sorte d’État fédéral nanti d’organes supranationaux qui se profilait malgré les résistances. (....) L’Europe unie n’aura-t-elle été qu’une convulsion créatrice de 75 ans ? Ou au contraire restera-t-elle comme un ancien athlète malade mais curable. Cette question est vitale. Si les Européens ne s’occupent plus que de leurs gilets jaunes respectifs et du petit profit qu’ils retirent des subventions de Bruxelles, ils finiront valets des puissances chinoises, américaines, russes et… indiennes.Réduite à une destination touristique, malgré ses 500 millions d’habitants et les performances économiques et étatiques de ses états membres, l’Europe risque de renoncer à la place qu’elle pourrait tenir dans le concert mondial. Une perte pour le monde car, la Suisse miniature mise à part, c’est la première tentative d’organisation d’un ensemble de nations différentes, avec des langues différentes, se fédérant autrement que sous la domination impériale.

 

Ce pourrait être un modèle pour une organisation mondiale sans laquelle la planète mourra, compte tenu des problèmes qui l’attendent. Selon Yves Coppens, ses habitants iront recommencer l’aventure sur d’autres planètes. Mais les mêmes problèmes s’y poseront, et ils se termineront de la même manière faute de solution trouvée maintenant ici-bas.

 

Menou Colombe

 

la-croix.com
 
Daniel Soulez Larivière, avocat essayiste et ténor du barreau français…                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                  
                    
 

Plaidoyer pour l’Union européenne

Daniel Soulez Larivière, avocat essayiste et ténor du barreau français s’interroge sur le destin d’une Europe qui demeure pourtant la première tentative d’organisation entre nations différentes, se fédérant autrement que sous une domination impérial            

 
 

Le président chinois Xi Jinping s’est déclaré favorable à l’intégration européenne en ajoutant : « Nous avons fait en quarante ans ce que vous avez fait en trois siècles [1] ». Une leçon d’histoire surprenante ! Sans doute voulait-il dire que depuis la mort de Mao Zedong, la Chine s’est réorganisée jusqu’à devenir aujourd’hui rivale des États-Unis pour la place de première puissance économique mondiale, en tête dans nombre de technologies.

Et nous, depuis le XVIIIe siècle, n’avons réussi qu’à nous étriper jusqu’aux horreurs de la Deuxième guerre mondiale, avant de commencer la construction de l’Union Européenne.

Chacun des États européens a connu des fermentations, constructions, destructions

L’empire chinois ne date pourtant pas de Xi Jinping. Quand débute la construction de la grande muraille au troisième siècle avant Jésus-Christ, son histoire a commencé depuis longtemps. Et celle de l’Europe ne démarre pas en 1957 avec le traité de Rome. Chacun des États européens a connu des fermentations, constructions, destructions. En France, l’État moderne a commencé au XIIe siècle avec Philippe-Auguste pour arriver à un royaume enfin uni sous Louis XIV, un travail de cinq siècles que la Révolution a hérité.

L’Allemagne, plus en retard, achève son unification avec l’écrasement de la France en 1870. L’empire austro-hongrois s’écroule en 1918. L’Italie se constitue en État au XIXe siècle. L’Espagne s’enrichit entre le XVe et le XVIIIe siècle et achève son processus unificateur avec la guerre civile au XXe. Quant à la Grande Bretagne, après avoir réussi à se constituer en Royaume-Uni, elle essaye de quitter l’Union Européenne au risque de voir le royaume désuni.

L’UE n’est pas un simple épiphénomène survenu par hasard après la Deuxième guerre mondiale. Elle est l’aboutissement d’un processus de plusieurs siècles pour chacun de ses États qui, après s’être fait la guerre constamment, ont trouvé plus intelligent et plus productif de s’unir.

La création de l’euro aurait dû être suivie d’une organisation politique

À la différence des empires romains ou ottoman, l’UE ne se fonde pas sur une conquête. C’est un phénomène nouveau à l’échelle du continent mais aussi par rapport à son histoire. Elle a commencé par échouer le 30 août 1954 lorsque l’Assemblée nationale française a rejeté la tentative de Communauté Européenne de Défense (CED) amorcée en 1950, alors que le traité avait été signé par six États le 27 mai 1952, et ratifié par l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas.

 

Au sortir de la guerre, la première solution paraissait l’union par l’armée, sous l’égide du commandant de l’Otan, lui-même nommé par le président des États-Unis. Cet échec a conduit à prendre le sujet par l’autre bout. Consciemment ou non, les pères de l’Europe pensaient que, grâce à la Communauté Européenne du charbon et de l’acier d’abord, puis au marché commun, ce qui avait échoué en démarrant par le politique aboutirait grâce à l’économie. Comme si la politique, étant une superstructure, devait suivre l’unification par les infrastructures selon un schéma néo-marxiste. Le traité de Rome a ainsi été signé en 1957 grâce à l’activisme de Jean Monnet, Robert Schuman, Konrad Adenauer, Paul-Henri Spaak et Alcide De Gasperi.(Maurice Faure alors jeune  secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères a signé pour la France)

L’organisation à 28 a plombé le début de l’intégration européenne

La création de l’euro, monnaie commune, après le traité de Maastricht de 1992, aurait dû être suivie d’une organisation politique. L’euro est toujours vivant mais, depuis le traité de Nice, entré en vigueur le 1er février 2003, complété par le traité de Lisbonne de 2009, l’Europe est passée de 6 ou 7 à 28. La fin du rideau de fer en 1989 a obligé l’Union Européenne à accueillir des nouveaux venus, contrairement aux vœux de François Mitterrand. Celui-ci était partisan d’une salle d’attente pour eux, dans une confédération européenne autour d’une union plus resserrée à huit. Mais la réunion de Prague en juin 1991 pour préparer ce traité avec Vaclav Havel échoua sous la pression des États-Unis toujours hostiles à une Europe forte, indépendante, devenue une « ennemie » sous Trump. Cette organisation à 28 a plombé le début de l’intégration européenne et tué dans l’œuf cette sorte d’État fédéral nanti d’organes supranationaux qui se profilait malgré les résistances.

 

Tout a basculé en 2005 avec l’avortement de la constitution européenne torpillée par Laurent Fabius, lors du référendum imprudemment lancé par Jacques Chirac.

L’Europe des 28, estropiée par le Brexit, présente une curieuse configuration historique : une monnaie partagée par 19 États, des adhérents au niveau de développement démocratique très hétérogène, une poussée centrifuge de l’extrême droite des pays fondateurs tels l’Italie et même l’Allemagne et les Pays-Bas, un désintérêt de l’opinion publique française selon les derniers sondages. Et pourtant, avec un parlement, un exécutif, une organisation judiciaire (la Cour de Luxembourg) nous avions presque les ingrédients de base pour constituer doucement un État fédéral sui generis.

Allons-nous repartir sur une phase de désordre ?

Ce vaisseau complexe va-t-il continuer vers son destin initial ou s’arrêter – comme souvent au bout de 75 ans (durée entre la mort de Louis XIV et la Révolution Française, de la troisième République, de l’empire soviétique) ? Allons-nous remettre les compteurs à zéro ? Repartir sur une phase de désordre, avec une monnaie unique suspendue au sort de la stabilité de la Banque Centrale Européenne ? Seule institution européenne efficace par la puissance de sa monnaie face à un dollar lui-même tout puissant, elle aura du mal à prospérer sans un soutien institutionnel plus organisé des États fondateurs.

 

Depuis la chute du mur de Berlin, l’illusion d’une gouvernance mondiale s’est traduite par l’apparition de la Cour Pénale Internationale. Un symptôme classique : l’apparition du juge suit toujours celle d’un État, même virtuel, qui dure aussi longtemps qu’on y adhère. La première guerre contre l’Irak a donné l’illusion de cette gouvernance mondiale sous l’égide américaine.

 

L’Europe risque de renoncer à la place qu’elle pourrait tenir dans le concert mondial

Discutant d’égal à égal avec les États-Unis, les Chinois ont créé la route de la soie pour soigner leur influence, voire leur propre impérialisme. Et l’Inde (1 milliard 339 millions d’habitants) ? La nature ayant horreur du vide, la gouvernance « américaine » prend la place dans sa zone d’influence et les autres puissances dans la leur.

 

Les intellectuels français se taisent, sauf Régis Debray pour qui l’Europe est un fantôme. Ce sentiment de déliquescence mortifère s’exprime souvent. L’Europe unie n’aura-t-elle été qu’une convulsion créatrice de 75 ans ? Ou au contraire restera-t-elle comme un ancien athlète malade mais curable. Cette question est vitale. Si les Européens ne s’occupent plus que de leurs gilets jaunes respectifs et du petit profit qu’ils retirent des subventions de Bruxelles, ils finiront valets des puissances chinoises, américaines, russes et… indiennes.

 

Réduite à une destination touristique, malgré ses 500 millions d’habitants et les performances économiques et étatiques de ses états membres, l’Europe risque de renoncer à la place qu’elle pourrait tenir dans le concert mondial. Une perte pour le monde car, la Suisse miniature mise à part, c’est la première tentative d’organisation d’un ensemble de nations différentes, avec des langues différentes, se fédérant autrement que sous la domination impériale.

 

Ce pourrait être un modèle pour une organisation mondiale sans laquelle la planète mourra, compte tenu des problèmes qui l’attendent. Selon Yves Coppens, ses habitants iront recommencer l’aventure sur d’autres planètes. Mais les mêmes problèmes s’y poseront, et ils se termineront de la même manière faute de solution trouvée maintenant ici-bas.

 

 
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28/04/2019
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