Là encore, aucune. Zéro. Nada. Sondages et études d’opinion sont tous mauvais, très mauvais, tant pour le "lider maximo" de LFI que pour le mouvement lui-même. Les Français n’ont pas mis longtemps à estimer que Mélenchon y allait avec de (trop) gros sabots, que sa volonté de récupération était par trop visible, que son exercice de "gauchissement" d’un mouvement défendant aussi d’incontestables valeurs de droite relevait de l’arnaque.
Cet épisode si important des gilets jaunes" autorise entre autres à s’interroger sur la stratégie de Wauquiez et de Mélenchon, deux des principaux chefs de l’opposition politique à Emmanuel Macron. Cette réflexion est d’autant plus nécessaire qu’au même moment, Marine Le Pen reconstruit son image personnelle, que le Rassemblement National est déjà "en ligne" pour les élections européennes de mai prochain, et semble en mesure d’en disputer la première place à La République en Marche, le parti du président. Pendant ce temps, Wauquiez... Pendant ce temps, Mélenchon...
En adoptant une ligne ultra-droitière, identitaire, conservatrice, le chef de LR ne s’est-il pas égaré? Le noyau dur des électeurs de François Fillon au premier tour de la présidentielle -10% des Français ce qui est loin d’être négligeable- persiste à le soutenir. Fort bien. Mais a-t-il conquis des votants lepénistes? Pas un. S’est-il rallié les bataillons de la droite modérée, centriste, européenne, sans lesquelles il lui sera même inutile d’entrevoir une candidature à la prochaine présidentielle? D’aucune façon, il semble avoir choisi de les abandonner à ses deux concurrents et adversaires directs, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, ainsi qu’à... Emmanuel Macron. Aucun des trois n’espéraient une telle offrande politique. Pendant ce temps, Les Républicains se rabougrissent, Laurent Wauquiez s’isole, et se profile une possible catastrophe électorale aux Européennes. Gageons que, si ce contexte se confirmait , Wauquiez serait aussitôt "dégagé", en particulier sous la pression des deux sénateurs tout-puissants Gérard Larcher et Bruno Retailleau.
Le mépris suicidaire de Mélenchon
Mélenchon, lui, ne court pas ce risque d’être éconduit. Ex-trotskiste aguerri, il a appris à "tenir" son mouvement d’une main de fer. Si les députés François Ruffin et Clémentine Autain s’autorisent quelques éclats et, parfois, l’expression à haute et intelligible voix d’un désaccord, ils sont isolés. Il n’en reste pas moins que la ligne Mélenchon semble atteindre ses limites: à force de le répéter, le député de Marseille a fini par nous faire entendre qu’il n’éprouve que mépris envers ce qui reste des socialistes, des Verts, des communistes, des sympathisants de Benoît Hamon, qu’après avoir sans doute hésité, il a donc choisi de repousser toute tentative et toute tentation d’union des gauches, en serait-il le numéro 1. Mais cette démarche peut être à la fois claire, déterminée et... suicidaire.
Car, après le scandale mettant aux prises Mélenchon, les policiers et les juges, après trois mois de mobilisation gilets jaunes et un soutien de tous les instants, jamais, à en croire les sondages, le socle électoral de La France Insoumise n’est apparu aussi faible. Les "groupies" de Mélenchon affirment que ces études d’opinion sont "fausses", "truquées". L’argument est certes un peu court, mais il traduit le désarroi qui taraude LFI: pourquoi cette période qui, selon Mélenchon, se définit comme "insurrectionnelle" profite avant tout à... l’extrême-droite? Et la question, bientôt, sera à nouveau posée à Mélenchon: union des gauches? Ou volonté de détruire tout ce qui n’est pas La France Insoumise? Wauquiez est enfermé dans un piège. Mélenchon est pris au collet. Marine Le Pen observe; Emmanuel Macron aussi.

dessin Courrier picard 24.01.2019