1224-Revue de presse L'écologie contre la démocratie 89 posts.
Dans "L'écologie contre la démocratie", le célèbre chroniqueur, connu pour ses livres polémiques sur Air France, Google, la SNCF ou EDF s'intéresse au projet politique des "écolos-zadistes" de Sivens et Notre-Dame-des-Landes. Interview réalisée sur le site de la retenue de Sivens.
- Que voyez-vous en regardant le vallon du Testet, ici dans la forêt de Sivens ?
Pascal Perri : "Ce que je vois ce n'est pas le site d'un grand projet mais une paisible petite vallée isolée du Tarn qui devait accueillir une modeste retenue d'eau. L'avantage ici c'est qu'il y a des forêts et des zones de repli... C'est donc le terrain idéal pour organiser une petite guerre moderne."
- Pourquoi écrire un livre sur ces conflits autour de l'écologie ?
Pascal Perri : "A Sivens comme à Notre-Dame-des-Landes, il y a la force d'un petit territoire, une unité de temps et d'espace. Et puis il y a ces histoires, ces récits, comme la plupart des journaux traitant l'actualité cherchent à en produire aujourd'hui avec deux adversaires clairement identifés : les agriculteurs d'un côté, les écolo-zadistes de l'autre. Les zadistes sont très peu représentés dans notre société. Leurs méthodes radicales et leur philosophie nihiliste obtiennent peu d'écho habituellement mais ils trouvent dans ces conflits de formidables caisses de résonance pour leurs idées. C'est une petite communauté en rupture avec la société globale mais, sur ces terrains d'expression, ils peuvent mettre leurs idées en marche. Les zadistes sont contre l'économie et pour la décroissance, contre la société de consommation, contre tous les projets d'aménagement que notre société développe : routes, retenues, centres de loisir, aéroports.
C'est aussi l'histoire d'une formidable manipulation. On a raconté à l'opinion publique une fable. Comme lorsque les réseaux sociaux véhiculent des théories simples, séduisantes mais fausses, ici les réalités sont travesties... A Sivens, il n'y a évidemment pas de barrage pharaonique ! Mais un petit groupe d'individus habiles a su tirer un profit maximum d'une situation banale : Un petit projet d'aménagement rural a engendré une polémique totalement surdimensionnée."
- Les combats écologiques sont souvent présentés avec un certain "romantisme", ce n'est pas le cas dans votre livre...
Pascal Perri : "J'ai surtout voulu souligner un grand nombre de mensonges reproduits à l'infini dans les reportages traitants de ces questions car, en matière d'information, la guerre se gagne d'abord avec des mots. Il est par exemple souvent évoqué de "Grands Projets Inutiles Imposés"... Bon, en venant ici il est facile de constater que le projet n'est pas immense, qu'il a une utilité pour les petites exploitations des environs et qu'il n'est pas imposé mais bien demandé par les agriculteurs. Il n'y a pas d'immenses murs de béton et ce n'est pas une vallée habitée qui doit être noyée.
- Pourtant les opposants ont gagné ! La construction de la retenue a été bloquée par Ségolène Royal...
Ce que les zadistes et leurs alliés écologistes ont réussi à imposer aux journalistes c'est leur terminologie, "leurs" mots de la guerre : projets imposés, agriculture extensive et productiviste, résistance pacifique, agro business... Tout ça c'est du vent. La vérité c'est que, dans ce territoire, il n'y a que de petites exploitations et des agriculteurs qui gagnent péniblement leur vie. Mais les zadistes ont obligé leurs adversaires à utiliser ces mots et à venir sur leur propre terrain guerrier, à s'énerver, à menacer... Alors même que ces agriculteurs, peu habitués - eux - à s'exprimer, voulaient juste rétablir la vérité sur leur situation et la taille de leurs exploitations ! En amenant leurs adversaires sur le terrain guerrier qu'ils avaient choisi, les écolo-zadistes ont marqué des points importants aux yeux d'une opinion mal informée. La vérité a été une victime collatérale de ces "récits d'actualité" quelquefois dignes de fictions".
- Il y a beaucoup de petits projets d'aménagements en France... Pourquoi les "écolo-zadistes" ont-ils choisi cette polémique locale ?
Pascal Perri : "Ces "histoires" sont des leviers formidables pour des groupes minoritaires mais très actifs et très organisés. S'il y avait un référendum, ces pensées là seraient marginalisées... Tout comme lorsqu'il y a des élections ici, les écologistes ne dépassent pas les 10 % ! C'est l'effet d'une loupe grossissante. Cela permet à des gens actifs et organisés d'exister. Les zadistes ont une vraie stratégie, ils savent quels sont les mots à produire, à diffuser pour manipuler les médias et l'opinion et arriver à leurs fins. Ici, le terrain était formidable".
- L'entité politique "Europe-Ecologie Les Verts" a-t-elle besoin des zadistes ?
Pascal Perri : "Les Verts utilisent beaucoup les zadistes en prônant notamment une démocratie participative... Pourquoi ? Simplement parce que, dans la démocratie élective, leur place est marginale. Lorsque les électeurs donnent leur avis, les écologistes n'obtiennent pas souvent la majorité. Mais là, on a une troupe militaire - les zadistes - qui occupe le terrain, et un groupe politique démilitarisé - les écologistes - avec quelques figures de proue comme José Bové qui peuvent négocier.
A Sivens ou à Notre Dame des Landes, une entité politique, les Verts, trouve un moyen d'imposer ses idées, d'agir sur l'actualité en encourageant les petits actes d'insubordination. Même si quelquefois - comme ici - cela se termine mal... Car ces actions sont dangereuses ! Le problème des Verts en France c'est d'abord que la démocratie est élective et ensuite... qu'elle a fait ses preuves !
Hôtellerie française : ces étoiles qui ne servent à rien
En France, 57 % des hôtels classés affichent de 3 à 5 étoiles, contre 19 % en 1995. Une montée en gamme "factice" car le classement par étoiles est devenu inopérant et obsolète, note le cabinet Coach Omnium dans une étude.
Comment évolue l'hôtellerie en France ? A première vue, le constat prête à l'optimisme, voire à la satisfaction. En effet, la nouvelle grille de classement (matérialisée par les étoiles) intervenue en 2009, puis la disparition de l'ancien classement en juillet 2012, ont donné lieu à une nouvelle répartition du parc français. Résultat : "57 % des hôtels classés affichent désormais de 3 à 5 étoiles, contre 19 % en 1995", note le cabinet d'études spécialisé Coach Omnium, qui publie lundi son "Panorama 2016 de l'hôtellerie en France" (*).
Un constat flatteur mais vite douché. "C'est ce que les pouvoirs publics appellent + une montée gamme + mais qui n'est qu'administrative et surtout factice dans la majorité des cas, grâce aux critères très minimalistes que le nouveau classement propose. De plus, il a été élaboré sans qu'aucun client d'hôtel n'ait été interrogé", déclare Mark Watkins, le directeur de Coach Omnium interrogé par "Les Echos".
Pour résumer, l'objectif du ministère du Tourisme, qui a décidé en 2006 de réformer le classement (devenu effectif en octobre 2012), et d'Atout France, l'agence chargée de la promotion du tourisme tricolore, était d'attribuer une étoile supplémentaire aux établissements du parc français. Ce qui fut fait.
Un exemple parmi d'autres : pour définir certains critères, comme la surface des chambres, la nouvelle grille a tenu compte des réalités de l'offre existante, comme la petite taille des chambres à Paris. C'est pourquoi on a imposé une surface minimale de 16 mètres carrés pour une chambre (avec salle de bains) dans les quatre étoiles... alors qu'on trouve des de plus de 18 mètres carrés chez Ibis.
Le critère prix bien avant les étoiles
Autre tendance de fond, et heureusement peut-être pour les hôteliers, rares sont les clients qui, de nos jours, tiennent compte du nombre d'étoiles sur la plaque lorsqu'ils recherchent un hôtel : 14 % contre 64 % en 2008.
Pour plus de 70 % des clients d'hôtels interrogés par Coach Omnium, le premier critère est aujourd'hui le prix qui "leur permet de se faire une idée bien plus fiable que les étoiles sur la gamme des hôtels auxquels ils ont affaire". Sur ce registre, Internet a tout changé dans la préparation de voyages, avec ses incontournables agences de voyage en lignes (OTAs) comme Booking.com, Trivago, Tripaddvisor, etc. qui proposent d'autres codes que les étoiles, et notamment les avis de voyageurs.
Ce que démontre amplement les dernières données relatives à l'Euro de football. "Les hôtels qui ont doublé voire triplé leur prix dans certaines villes hôtes ne font pas le plein tandis que la location chez les particuliers explose", poursuit Mark Watkins.
Le nombre d'hôtels "sans étoile" augmente
Parmi les hôtels non classés, une grande partie sont des exploitants auparavant homologués de 0 à 2 étoiles qui n'ont pas voulu aller vers les nouvelles normes. Sans oublier près de 600 hôtels de chaînes qui ne sont volontairement pas classés sur environ 3.200 unités sous ce statut. Ces établissements "sans étoile" ne correspondent pas nécessairement à des hôtels médiocres. "On y trouve à la fois des établissements qui sont en voie/attente de fermer et qui n'entament plus aucune mise aux normes, et des hôtels de grande qualité qui n'ont tout simplement pas souhaité arborer les nouveaux panonceaux rouges", observe l'étude.
Effet pervers de la nouveau classement : le nombre de ces "sans étoile", qui avait reculé de 25 % entre augmente 2012 et 2015 (cliquez sur l'infographie ci-dessous), est reparti à la hausse en 2016. l'Insee en a recensé 4.572 cette année, soit un quart du parc hôtelier français, contre 4.345 début 2015 (+ 5 %). Preuve que le renouvellement de la distribution des étoiles tous les cinq ans n'a pas forcément été suivi d'effet.
La raison ? "Certains hôteliers, après avoir touché une subvention ou une aide publique accordée uniquement sous la condition d'être classé, n'avaient plus besoin de cet artifice au-delà et n'ont pas redemandé une reconduite des étoiles. D'autres se rendent bien compte que le classement n'apporte encore une fois aucun client supplémentaire et que seule une commercialisation, où les étoiles n'ont pas d'importance, compte vraiment".
Nouvelles attentes de la clientèle
Bref, pour Coach Omnium, c'est la classification "hôtel" elle-même qui devient caduque. Pis, elle freine l'innovation. Or, la réalité c'est que les hébergements touristiques français deviennent hybrides. Ainsi, des hôtels low-cost commencent à transformer une partie de leur bâtiment en chambres à partager, avec locations au lit. On les appelle "auberges de jeunesse nouvelle génération". On connaissait déjà les établissements partagés entre hôtel et résidence de tourisme, aux logements avec kitchenette. Le phénomène Airbnb, en plein essor, donne des idées aux hôteliers qui cherchent à conquérir de nouvelles niches de clients, aux attentes différentes de leur clientèle historique.
Sur le fond, ces sites en ligne comme Airbnb, Homelydays et consors détournent-ils -comme la profession les en accuse, _ les clients de l'hôtellerie "classique" ? Pas évident . "Sur une période de six ans, on note une stabilisation du taux d'occupation des hôtels en France et une légère baisse de la fréquentation, à 202 millions de nuitées en 2015 (-5 %) contre 14 millions de nuitées pour Airbnb, souligne Mark Xatkins. Cette baisse de la fréquentation s'explique surtout par le fait que le parc hôtelier a augmenté".
(*) Si les 68 enseignes recensées par Coach Omnium ne représentent que 17 % du nombre d'hôtels (soit 3.152 hôtels en filiales, franchises et mandats de gestion), elles réunissent 39 % du nombre de chambres et près de 47 % de parts de marché. Autrement dit, près d'une nuitée hôtelière en France sur deux (dans l'hôtellerie classée et non classée) se loge dans un hôtel de chaîne intégrée.
LES ECHOS