1200- Le système est arrivé à son terme 12 posts

J'étais à Epinay et j'ai, avec beaucoup d'autres contribué à créer le PS.Je suis d'accord avec Didier,"le système est arrivé à son terme."

Marc Baldy

Ex-adjoint de Delanoë, Didier Guillot rend sa carte du PS. Il ne veut plus faire partie de cette machine à produire de la "médiocrité".

Publié le | Le Point.fr

 

"On avait des Jospin, des Poperen, des Rocard, des Chevènement, on a désormais Benoît Hamon et consorts", se désole Didier Guillot. 
"On avait des Jospin, des Poperen, des Rocard, des Chevènement, on a désormais Benoît Hamon et consorts", se désole Didier Guillot.  © LANCELOT FREDERIC/SIPA

 

Didier Guillot n'est pas une figure première du PS, du moins nationalement. C'est toutefois un excellent connaisseur du Parti socialiste. Il y est entré à la fin des années 1980 et a grimpé pas mal d'échelons : secrétaire de la section Jean-Baptiste Clément — ô combien symbolique puisqu'elle fut celle de Lionel Jospin et Bertrand Delanoë —, il est, de 2008 à 2014, adjoint au maire de Paris en charge de la vie étudiante (il bénéficie d'ailleurs d'un appartement de la ville, à loyer non conventionné, ce qui lui a valu pas mal de critiques). Didier Guillot est désormais président de Paris&Co, l'agence de développement économique de la capitale. Il est aussi très en colère. Contre les frondeurs, qu'il juge déloyaux, mais surtout contre le Parti socialiste. Il a rendu sa carte il y a quelques jours, fatigué par le népotisme et les règlements de comptes, par la reproduction sociale — que le PS dit combattre dans la société... — et par cette fabrique d'apparatchiks qui tourne à plein. Plongée dans un parti qui ne tourne plus très rond...

 

Le Point : Vous quittez, après d'autres, le PS. Pourquoi maintenant ?

Didier Guillot : On pourrait croire qu'il y a une dimension personnelle, que je suis frustré puisque je n'ai pas été choisi par la fédération du PS de Paris pour être au conseil de la métropole du Grand Paris. Mais c'est justement ce processus de nomination, semblable à celui qui a eu lieu lors des régionales, qui m'incite à rendre ma carte. Le premier fédéral de Paris, Rémy Féraud, a eu un raisonnement absurde : il a décidé qu'un tiers des membres socialistes serait désigné selon la représentation proportionnelle des courants, ce qui est la plaie absolue du PS. Le Parti socialiste arrive au bout d'un processus. Il fonctionne à l'envers, et la désignation au conseil de la métropole a été la fois de trop.

Cela fait pourtant plus de quarante ans que le Parti socialiste fonctionne ainsi...

Oui, mais je remarque qu'il y a désormais un problème : il n'y a pas photo entre la qualité des personnalités socialistes quand je suis arrivé au PS, en 1988, et celle d'aujourd'hui. On avait des Jospin, des Poperen, des Rocard, des Chevènement, on a désormais Benoît Hamon et consorts. Il n'y a quand même pas photo ! Les courants étaient alors de vrais courants, avec des clivages forts, de la réflexion, de la production intellectuelle. Aujourd'hui, ils ne produisent plus rien. Qu'a produit le NPS de Benoît Hamon en dix ans ? Qu'a produit le Mouvement des Jeunes socialistes en vingt ans ? Il vote à chaque élection à 80 % pour Benoît Hamon, grâce à son centralisme démocratique, mais à part ça ? L'exemple vient d'ailleurs du haut : le premier secrétaire, Jean-Christophe Cambadélis, ne parle qu'au microcosme parisien, personne d'autre ne comprend ce qu'il dit. François Hollande parlait un peu au même public, dont les journalistes, mais c'était d'une autre tenue !

Qu'est-ce qui fait qu'un système qui a fonctionné pendant des décennies arrive, selon vous, à son terme ?

Le problème, c'est que le fonctionnement interne du PS, fondé sur les courants et la proportionnelle, c'est la prime à la reproduction sociale et à la médiocrité. C'est en ce sens que, selon moi, le PS est à la fin d'un cycle entamé en 1971, lors du congrès d'Épinay. Je m'explique. Chaque structure du parti – c'est-à-dire la section au niveau local, le conseil fédéral au niveau départemental et le conseil national au niveau national – est composée de gens désignés en fonction de leur appartenance à tel ou tel courant, et du poids de chaque courant. Dès qu'on doit faire un compromis avec quelqu'un, dès qu'un courant doit s'associer avec un autre pour gagner en influence, on fait de la place pour les amis des amis. On se coopte, les pairs désignent leurs pairs, et la reproduction est en marche. Les apparatchiks forment des apparatchiks, les anciens collaborateurs forment des nouveaux collaborateurs...

Quel est l'effet de cette cooptation lors des élections ?

C'est une catastrophe, surtout aux scrutins de liste que sont les élections européennes et régionales. Que le sortant ait été bon ou non, tout le monde s'en moque. Seul compte le rapport de force du moment, la logique des courants. Rendez-vous compte, à Paris, pour constituer les listes aux régionales, quasiment aucun conseiller régional sortant n'a été réinvesti ! La question n'est pas celle de la compétence, c'est de savoir si untel est un collaborateur influent ou non d'un leader socialiste... Les places se répartissent donc entre les trois forces du moment : celles de Valls, de Cambadélis et de l'aile gauche du PS. On en arrive à renouveler 80 % d'une liste simplement parce que les sortants ne sont plus dans le bon courant, la bonne écurie. Et on se retrouve avec, en numéro 3 sur la liste aux régionales à Paris, Fanely Carrey Conte, la pire des frondeuses à l'Assemblée ! C'est affligeant.

En gros, trop de démocratie tue la démocratie, puisque que la volonté de représenter le plus fidèlement le poids de chaque courant aboutit à ces travers. Le système n'est pas réformable ?

Lionel Jospin avait essayé de casser la logique des courants après le congrès de Rennes de 1990, mais il n'est pas allé au bout de la logique. Dans ma section, j'ai essayé de me battre contre ce système, j'ai mis en place l'élection directe par les militants de leurs représentants aux instances de direction, ça m'a valu la haine inextinguible des courants minoritaires ! De façon un peu présomptueuse, j'imaginais que cette désignation directe serait copiée, parce qu'elle donne la prime à l'excellence, et non à la médiocrité. Je me suis trompé



06/02/2016
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