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Article publié dans la Revue  Quercy passions

Rubrique Mémoire  


Publifusion et jean-claude Delmas.



 

Mon boulevard Gambetta  par  Marc Baldy


Dans la mémoire de ma génération, sortie du Lycée Gambetta voilà un demi-siècle, le Boulevard Gambetta, au cœur de Cahors,a laissé des souvenirs qui ne s'effacent pas. Dans  « Boulevard Gambetta », mon premier ouvrage, publié en 2004(1), j'évoque ceux  des années Faure, ceux des années Charles ensuite.


 Le centre de la vie cadurcienne


Au cours de cette période,le public l'a probablement  déjà oublié,nos champs Elysées cadurciens ont un peu changé, totalement réhabilités, chaussée et trottoirs,notamment dans la partie basse qui en avait bien besoin, rénovée sous la maîtrise de l'architecte urbaniste Gérard Fresquet alors que je siégeais à la municipalité. Plus récemment, (belle preuve de  continuité !), la municipalité Lecuru a remodelé la partie haute afin de terminer ces travaux nécessaires. Les cadurciens en ont beaucoup parlé, dans les boutiques et les bureaux, sur le marché du samedi mais aussi dans les bistrots du boulevard. « Les trottoirs sont trop larges ! Ils ont supprimé des places de parking ! Les petites marches sont dangereuses pour les personnes âgées ! Madame Denise M. a failli s'y casser une jambe…. »Dans quelques mois personne n'en parlera plus, s'imaginant que cette artère a toujours été ainsi disposée. Ainsi va la vie.

Si cet axe principal de Cahors semble immuable, installé au cœur de la ville de toute éternité, ce n'est pas exact puisque notre boulevard n'existe que depuis le comblement du fossé et la destruction des murailles ouest de la ville. Le boulevard doit son identité et son caractère unique aux magasins avec terrasse, édifiés devant les immeubles, sur le côté droit de la rue Clémenceau à la place de Gaulle.

Chacun possède ses souvenirs et son image de notre artère principale.Pour moi, c'est depuis plus d'un demi-siècle la scène d'un grand théâtre de la vie publique du chef lieu, sur laquelle se manifestent les évènements marquants de notre vie commune.L'hôtel de ville en est le cœur, dans sa partie la plus commerciale, de la rue Clémenceau à la rue du Portail Alban.

 

 

 

 

L'histoire y habita

 

 

L'histoire  y habita avec Anatole de Monzie, si longtemps ministre,Maire de Cahors, Président du Conseil général,ami des intellectuels, des artistes, écrivains, musiciens, peintres

…comme elle y habita avec Maurice Faure, jeune ministre des Affaires européennes et signataire, voici 50 ans du traité de Rome. Maire,président du Conseil général il y reçut une foule de personnalités que j'eus parfois l'honneur de rencontrer au cours de 25 ans de mandats comme Maire adjoint. J'évoque ces éminents personnages dans les portraits de nos compatriotes dans ce blog dont la première partie a été publiée en 2006(2).

C'est sur ce parvis que la foule acclama les résistants ses libérateurs et le comité de la libération installés au balcon  de la mairie. Elle  exprimait  sa joie et son soulagement le 17 août 1944.C'est là, longtemps que chaque année, la municipalité offrait un spectacle et donnait un bal chaque anniversaire de ce 17 août. C'est là que nous avons reçu tous les ministres et les personnalités de passage, tous les mariages…Georges Pompidou  en manteau poils de chameau et son épouse qui vient de nous quitter tournaient un jour, incognito, l'angle du hall de La Dépêche.

François Mitterrand, Président de la République honora cet hôtel de ville en 1982, au cours d'une visite officielle, arrivant à pied par la rue Foch  au milieu de centaines de lotois enthousiastes  qui se pressaient derrière les barrières.

Je me souviens encore d'une photo prise l'année précédente, sur le parvis qui vient d'être refait, le 10mai 1981 à la nuit. Il pleuvait légèrement et le boulevard mal éclairé, était plongé dans une quasi obscurité. Je me dirigeais, mince, en manteau de cuir, vers une voiture qui m'emmènerait à Mercuès fêter la victoire de François Mitterrand. Je mesurais les efforts de ces douze dernières années et je pensais à toutes celles et à tous ceux qui y avaient contribué.

Pour moi, ce Boulevard ce sont surtout des souvenirs qui montrent que si la ville reste à peu près la même, peu à peu elle se modifie et ses habitants se renouvellent sans cesse.



 « L'on ne se souvient bien que de quelque part » écrit Jean-Michel Ducomte dans la préface.

J'ai choisi d'interpréter le monde à partir de ce petit morceau de notre mémoire même si cette vision du futur, « pour être exprimé loin des lieux où semblent se dessiner le destin du monde ne doit pas oublier qu'il existe des ailleurs et qu'elle se doit de rester lucide. »


Le « boulevard » produisait du lien social


Le Boulevard dans ma jeunesse c'était le café de Bordeaux face à l'hôtel de ville. C'est là dans l'établissement de Jean Pechmalbec que se retrouvaient les joueurs de rugby,

champions de France de seconde division,et les jeunes attirés le dimanche par la boîte de nuit qui fonctionnait au rez de chaussée avec l'orchestre de Jimmy Rena. Les rugbymens du stade cadurciens avaient table ouverte en face à la Taverne au fond de la petite place Escorbiac du nom du chef  cuisinier connu dans tout le pays. Jacques Cousi,le commissaire de Police y tapait le carton se levant de temps à autre pour pousser  un coup de gueule au commissariat sous la mairie,dans l'actuel bureau de l' Etat civil qu'occupait quatre ou cinq agents de ville débonnaires dont le père de Papinou et le grand père de Sophie Balmary.

Tous deux se sont éteints hélas, (comme mon copain l'aimable Kadour  plongeur du Bordeaux dont nous ne savions pas encore qu'il appartenait à une minorité visible !) voilà quelques mois à la résidence d'Olt où vit maintenant  ma mère. Celle-ci fit la connaissance du futur député communiste Henri Thamier le jour de son brevet supérieur,"en faisant le boulevard",non loin de là, au début des années 30.

Les treizistes,-on disait alors, depuis Vichy, le jeu à Xiii, ce qui  les irritait fort -se retrouvaient à l'Alsace , la porte à côté,(l'Interlude d'aujourd'hui) ou à l'Industrie, tout contre le bazard Ladevèze devenu la brasserie  Le Chantilly  à l'angle de la rue Foch. Dans ce bazard des jeunes (dont je n'aurais pas la cruauté de donner les noms !) s'amusaient à distraire le vieux commerçant en blouse grise pour lui piquer ses bonbons. Son nom Ladevèze, était régulièrement fourni au Lycée Gambetta à tous les nouveaux surveillants qui demandaient le nom du coupable des plus grosses bêtises. Ce qui lui valait une fâcheuse réputation d'élève dissipé, totalement injustifiée.



Les footeux et la petite bourgeoisie locale, le barreau notamment  et des jeunes gens de bonne famille,aujourd'hui médecins,avocats, pédégés ou président de collectivité, notables cadurciens ou toulousains qui s'étaient baptisés eux mêmes « les petits cons du Tivoli » se retrouvaient au Tivoli dans l'immeuble actuel du crédit agricole.

Pierre Baron opticien comme son grand père a installé sa boutique dans la bijouterie Mandelli. Son père, le très apprécié Dr Jean Baron épatait la galerie en descendant le boulevard à skis les jours de neige. Monsieur Vinel a cédé sa bijouterie horlogerie à une banque au dessous du hall de  La Dépêche.

Derrière,le hall dévolu aux voyages et à la publicité Raymond Chalade Rédacteur départemental travaillait du matin tôt au soir tard en bras de chemise et bretelles. Toute une théorie de successeurs sont passés par là,dont Martin Malvy qui fut quelques années auparavant correspondant du journal Sud Ouest plus haut face au tribunal. M et Madame Charvet tenaient la Maison de la presse à l'entrée du parvis de l'hôtel de ville.

La librairie Lagarde fut tenue par M. Frances et Mme Dubois assistée par ma tante Renée, tout près de la pharmacie du père Lagarde au coin de la rue Wilson, devant laquelle M. Paul Senac dit « Zizou »beau père du Dr. Pierre Gayet à qui j'ai succédé au conseil général, me prodiguait non plus ses leçons de mathématiques réservées au lycée mais ses convictions radicales. Vous voyez Baldy, disait il dans son costume noir trois pièces les pouces sous les bretelles, le chapeau un peu repoussé : «  Les mots c'est comme les sacs en caoutchouc !ça prend la forme de ce qu'on met dedans ! »

Guy, le chausseur beau père de Jean-Pierre Terrou, nous rejoignait parfois s'il ne participait pas à une belotte un rami ou une manille au café voisin. Tous ces adultes s'adressaient alors aux adolescents que nous étions, comme à des hommes. Cahors était une grande famille. Il n'était pas besoin de créer du lien social. Sur le boulevard Gambetta le lien social existait tout naturellement.

 

 Nous  « faisions le boulevard »


 Les lycéens de Gambetta,les lycéennes de Clément Marot et les normaliennes de l'Ecole normale d'institutrices de Cabessut, « faisaient le boulevard » le jeudi après midi, montant et descendant de Clemenceau au portail Alban,se retrouvant sur cette portion de la voie « royale »… Je devrais plutôt dire républicaine puisqu'elle porte le nom du grand homme de Cahors, Léon Gambetta, né rue Wilson et dont les parents tenaient boutique place du marché.



Il est en ce moment descendu de son piédestal et tarde à y revenir pour cause de parking sur les allées Fènelon et de vestiges de la ville d'il y a deux mille ans. Mais là je n'ai pas de souvenirs !

                                                                Marc Baldy

(1) »Boulevard Gambetta »Publi Fusion, Village artisanal Regourd 46000-Cahors

(2) « Le blog de Marc Baldy » Publi Fusion

 

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01/02/2009
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