553-Carla,Ségolène,Aux sources de l'imaginaire 2 posts, une video

Je ne résiste pas au plaisir de publier ici un article,un seul,de  Mariette Darrigrand,publié par Rue 89.parce qu'elle a tenu un blog pendant la campagne présidentielle,cette sémiologue, dont le nom et le visage évoquent pour moi un grand patron originaire du du SudOuest, que j'ai servi au Ministère,je souhaite que les internautes qui ne la connaissent pas puissent lire un de ses papiers.


La parité existe, TF1 l'a rencontrée. Dans le 20 heures de samedi 2 février, à propos de l'événement du jour -non pas la rébellion tchadienne mais le mariage présidentiel- la parité était à l'honneur. La nouvelle première dame de France était présentée comme la croqueuse d'hommes qu'elle-même dit être, caractéristique bien normale depuis la parité.

La parité, donc. Tiens, on n'avait pas remarqué…
Depuis certaines alarmes médiatiques lancées en 2005 par quelques plumes réactionnaires dénonçant le grand déclin, la grande débandade, la tsunamique féminisation de la société, le cadre idéologique s'est sensiblement revilirisé. L'élection de 2007 a été gagnée sur des valeurs "viriles": rupture avec l'immobilisme mou, ordre juste et musclé, promesse de redresser la France et même de la tirer vers le haut…

Une mauvaise utilisation de la féminité

Ségolène a perdu pour de multiples raisons, parmi lesquelles une mauvaise utilisation de sa féminité. A la fois trop féminine: le glam ne peut pas protéger les citoyens, même si, dans un premier temps, il les séduit. Et insuffisamment, car n'explorant pas le féminin au sens d'Autre de la norme. La société est violente: soyons pour la paix. La société produit toutes sortes de déchirements et de ruptures: produisons de la continuité, du durable…

La tâche évidemment était difficile et la tenter nécessitait d'oser délaisser les stéréotypes de magazines - "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus", gros succès au pays de Simone de Beauvoir -pour descendre dans les profondeurs des archétypes: sources universelles de l'imaginaire humain.

Carla, logiquement, en reste aux clichés, dont deux principaux: celui de la femme émancipée (désir calqué sur celui des hommes) et celui de l'artiste (seule condition censée être intéressante).

Le week-end précédant l'union présidentielle, on a pu penser que Ségolène avait atteint la profondeur des images fondamentales. Invitée de Michel Drucker le dimanche 27 janvier, tout de noir vêtue comme une veuve méditerranéenne, elle était la femme trahie, la femme délaissée.



Grandeur tragique, noblesse des sentiments intenses, Ségolène incarnait enfin une vraie héroïne: Ariane à Naxos.

La femme quittée, figure à succès.

Souvenons-nous. Ariane, le fil… Elle l'aide, son Thésée, comme la bouchère, le boucher, l'éditrice, l'écrivain, l'énarquesse, l'énarqueux… Elle le guide jusqu'à ce qu'il triomphe du Minotaure, qu'il se libère du Labyrinthe… Oui, mais voilà, la parité n'a qu'un temps, c'est connu depuis trente siècles. Une fois qu'il a gagné, le beau guerrier quitte la Crète emportant celle à qui il doit le succès, mais à la première île venue (Naxos), il l'abandonne.

La femme quittée, sublime dans ses pleurs, est une figure à succès. La littérature féminine en est pleine. Voir récemment le récit qu'a fait Justine Lévy de son abandon par Rafaël Enthoven au profit d'une certaine Carla…

Bien sûr, les femmes quittent aussi, l'indépendance financière les rend moins soumises, la cruauté est équitablement répartie entre les sexes. La question, pour qui regarde le spectacle politique actuel, n'est pas de cet ordre psychologique, mais concerne le langage collectif, les représentations dominantes.

A droite, la Dame reste la femme du Dominus.

Devant quoi sommes-nous? A gauche, l'échec du couple paritaire. L'homme et la femme sont formés à la même école, elle l'aide puis c'est à lui de le faire. Echange des rôles, parfaite réciprocité. Belle théorie mais le cas de figure reste rare. Hollande-Royal ont échoué. Les Clinton sont à la peine.

A droite, la recolorisation du couple traditionnel. La Dame -comme dans première dame- reste la femme du Dominus. Celui qui donnera le Dom -comme dans Dom Juan- est le chef de la Domus, la maison latine désignant l'ensemble des personnes vivant sous le même toit. Certes, au temps où les identités se multiplient, où les avatars prolifèrent, la Dame peut être dominatrice à ses heures (Domina), ou conduire de main de maîtresse des scènes de ménage: Mrs Smith est armée…

L'histoire de notre pays dira prochainement si cette nouvelle dame peut faire avancer d'un cran la parité qu'on lui prête. Va-t-elle faire bouger les lignes de la domination? Qu'a-t-elle à sa disposition de plus qu'une Ségolène? Carla est une "artiste" au sens jet set de ce terme. Nicolas, qui de toute évidence rêve pour lui-même de ce nouveau statut aristocratique, va-t-il, sous la force de cette créatrice, descendre du piédestal de metteur en scène qu'il aime s'allouer, pour ne plus être qu'un simple inspirateur?

Suspense haletant que nous suivrons bien sûr, mais avec un certain septicisme car la langue nous donne un indice. Un indice en forme de vide sémantique. Avez-vous remarqué que le mot Muse n'a pas de masculin?




07/02/2008
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